Contrer la sécheresse grâce aux retenues d’eau
Début août, 49 départements étaient concernés par un arrêté de restriction d’eau : 16 en "crise", 11 en "alerte renforcée", 17 en "alerte" et 5 en "vigilance". L’irrigation n’a pas été interdite dans tous ces départements mais les mesures sont différentes.
Les arrêtés de « crise » interdisent tous les prélèvements d’eau non-prioritaires, y compris les prélèvements à des fins agricoles. Le niveau d’alerte « renforcée » oblige à réduire les prélèvements à des fins agricoles supérieures ou égales à 50 %, la limitation est plus forte pour les prélèvements d’arrosage des jardins, espaces, verts, golf… le niveau « alerte » interdit les prélèvements à usages agricoles inférieurs à 50 %. Le niveau de « vigilance » quant à lui n’a pas de conséquence sur les prélèvements à des fins agricoles. Au sein d’un même département, il peut y avoir différents niveaux de restriction. Quand on regarde dans le Tarn, il apparaît comme étant en « crise » sur une carte représentant les restrictions agrégées mais si on regarde le détail des zones soumises à ces restrictions, seule une petite partie du département est concernée. « Les restrictions d’eau à des fins agricoles ne concernent que 0,7 % des irrigants du département et seulement 1 % du territoire », précise Pierre Vincent, co-président de la commission environnement de la FRSEA Occitanie. « Nous nous sommes battus contre cette carte trop généraliste qui alimente les peurs des agriculteurs et des autres utilisateurs ». « Je sors de la réunion hebdomadaire du comité de gestion de l’eau avec des représentants de l’état, des pompiers, du conseil départemental, et tout le monde étaient sereins, nos stockages d’eau sont presque tous pleins et l’humidité des sols est pour le moment assez élevée. Il n’y a donc pas de tension sur l’utilisation de l’eau dans le département ». Ainsi, seulement une soixantaine d’agriculteurs doivent restreindre leur utilisation d’eau dans le département. Ces producteurs, soumis à des restrictions environ deux ans sur trois, ont adapté leurs productions. Ils privilégient, par exemple, les cultures d’hiver. « Quand ils ont un terrain adapté, ils créent des petits bassins collinaires pour retenir l’eau de pluie ».
« Ne pas avoir peur de stocker de l’eau »
Il note également que les agriculteurs concernés sont situés sur des bassins-versants qui ne possèdent pas d’ouvrage de retenue d’eau en amont. « Il est difficile de mettre en place de nouvelles réserves d’eau. Sur le Tescou, un cours d’eau du département, on parle d’un bassin de stockage depuis 1975 et personne n’a le courage de le faire. On n’arrive pas à concrétiser les projets et je ne suis pas très optimiste pour la suite. À chaque fois, les ouvrages sont bloqués, car il manque un papier, une étude… », s’insurge Pierre Vincent. Cette réalité est la même sur tout le territoire. Ainsi, dans les Landes, le dernier ouvrage date de 2005, il s’agit du lac du Gabas qui permet le stockage de 20 millions de md’eau, dont 10 sont utilisés par les irrigants. Si Jean-Luc Capes, 2vice-président de la Fdsea 40, apprécie qu’il y ait « des ouvrages de stockage opérationnels » « limitant les restrictions », il dénonce « les contraintes administratives et environnementales qui créent de la surenchère et empêchent l’aboutissement des projets ». « Il ne faut pas avoir peur de stocker de l’eau ». Sur le bassin de l’Adour et de la Garonne, il pleut tous les ans entre 80 et 93 milliards de md’eau, dont 33 milliards d’eau efficace. « Toutes activités confondues, nous utilisons 2,1 milliards de m3 par an en moyenne, il y a un déficit de 280 millions de m3, ce n’est pourtant pas compliqué à stocker et cela ne représente rien comparé à la pluviométrie, mais tous les projets avortent, c’est l’inertie totale », dénonce le 2vice-président. Pierre Vincent et Jean-Luc Capes soulignent tous deux que le stockage de l’eau n’est pas seulement un enjeu agricole, mais un enjeu pour le futur de tous les utilisateurs des territoires pour faire face aux conditions climatiques de plus en plus aléatoires. « Regardez cette année la pluviométrie a été importante et en août nous manquons d’eau, pour tous les utilisateurs et nous n’avons pas assez de moyens pour la stocker, c’est désolant », conclut Jean-Luc Capes.
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