A l’occasion du Monde Festival, la présidente de la FNSEA est venue débattre avec Brigitte Gothière, porte-parole de l’association L214 qui prône l’égalité entre espèces et l’abolition de l’élevage. Devant une salle partagée, Christiane Lambert a su, à de nombreuses reprises, soulever les incohérences et trouver les mots pour défendre son métier, insistant sur les progrès réalisés par les éleveurs en matière de bien-être animal.
« Pour nous, les animaux ne doivent pas être des ressources alimentaires », a rappelé d’emblée Brigitte Gothière, porte-parole de l’association L214, lors du débat organisé le 23 septembre par le Monde Festival et intitulé « Demain, tous végans ? ». Une posture logiquement inacceptable pour Christiane Lambert, la présidente de la FNSEA, qui intervenait face à elle et qui de son côté « ne croi[ t ] pas à un monde végan ». « Les nutritionnistes le disent, on a besoin de lait, de viande, pour être en bonne santé », ajoute-t-elle. Une affirmation néanmoins contestée par Renan Larue, professeur d’université qui vient de créer un cours sur le véganisme à l’université de Californie. Pour lui, « un régime végétarien ou végétarien bien équilibré apporte tous les nutriments » et rend donc inutile l’exploitation animale. « On devrait élargir aux animaux de rente la logique qui fait que l’on condamne les mauvais traitements sur les animaux de compagnie », ajoute-t-il. « Une société végan existe déjà ici et maintenant, poursuit-il, puisque les végans parviennent très bien à vivre parmi nous ». Derrière la question de la philosophie de vie se pose néanmoins celle de la demande du consommateur qui, à plus de 97 %, continue à vouloir consommer de la viande. Et si Brigitte Gothière estime que les vidéos de son association ont pour but de « recréer le lien entre la viande dans l’assiette et l’animal qui existait avant », Christiane Lambert tient elle aussi à mettre sur le devant de la scène un certain nombre de vérités méconnues sur l’élevage. « Il n’y a qu’une seule ferme de 1 000 vaches en France, 98 % des exploitations françaises comptent moins de 150 vaches, pour une taille moyenne de 56 vaches », explique-t-elle. De même pour l’élevage porcin, où la moyenne française tourne autour de 180 truies, « loin des élevages de 5 000 truies en Allemagne, de 10 000 truies en Pologne, ou même de 54 000 truies en Chine », poursuitelle. « L’élevage industriel est ailleurs, pas en France », tient à souligner la présidente de la FNSEA.
Des éleveurs acteurs du bien-être animal
Si les consommateurs souhaitent encore manger de la viande, les éleveurs savent également que les carnistes ( ceux qui considèrent comme normal le fait de manger de la viande ) sans aucune empathie pour les animaux sont de plus en plus rares, et que la demande sociale pousse à améliorer le bien-être animal dans les élevages. Sous l’impulsion d’ONG welfaristes, de nombreux progrès ont été réalisés. « Oui, il y a 15-20 ans, le sujet du bien-être animal n’était pas une préoccupation majeure, mais aujourd’hui, quand les éleveurs ont la possibilité de reconstruire et de moderniser leurs bâtiments, ces préoccupations sont prises en compte », explique Christiane Lambert. Et ce, sans aucun retour économique derrière. « Vous, vous parlez, mais nous on agit : ce sont les éleveurs qui prennent les risques, qui investissent », et qui pourtant continuent d’être stigmatisés par des associations anti-viande qui prétendent « prôner la paix et la justice ». La présidente de la FNSEA évoque la charte pour le bien-être animal, mise en place il y a plusieurs années par les professionnels, et les nombreux progrès réalisés pour le confort des animaux, que ce soit au niveau de l’espace ou du couchage. Sans compter que les bâtiments, souvent décriés par les associations comme source de malêtre comparativement au plein air, ont aussi un rôle de protection : « en plein soleil l’été, les cochons qui ont la peau très sensible prennent des coups de soleil, à l’inverse en hiver les truies ne laissent pas leurs petits téter leurs mamelles gercées » énumère Christiane Lambert. « Les instituts de recherche aujourd’hui travaillent pour mieux comprendre les comportements des animaux et identifier leurs besoins », et les éleveurs s’inscrivent pleinement dans cette dynamique. « Je crois à un monde où l’élevage perdure en répondant pleinement aux attentes de la société concernant le bien-être animal, mais cela suppose aussi une rentabilité économique : aujourd’hui, la moitié des éleveurs gagnent moins de 350 € par mois ! », rappelle la présidente, en conclusion d’un débat qui, s’il n’aura pas permis d’accorder les positions, a eu le mérite d’exposer clairement et sans caricature les arguments de chacun.